in camera présente une vingtaine de photographies en noir et blanc d’Eri Makita.
Eri Makita est née à Chiba au Japon, en 1968. Diplômée en mathématiques à la Japon Women’s University de Tokyo en 1992, à l’age de 25 ans, Eri Makita commence à s’intéresser à la photogaphie et aux techniques du tirage argentique. Sa formation scientifique initiale restera néanmoins déterminante.
En 1994 elle s’installe à Paris, fréquente plusieurs photographes, notamment Jun Shiraoka. Fidèle aux Rencontres d’Arles, elle étudie attentivement les techniques de tirage et la singulière beauté qui s’en dégage. Elle affirmera dès lors un goût prononcé pour le développement et prodiguera un soin particulier à la qualité de ses tirages. Aujourd’hui elle vit et travaille à Chiba.
Ses photographies ont été présentées dans de nombreuses expositions au Japon et en Europe, notamment aux Rencontres d’Arles, ainsi que dans des livres et des magazines, comme Asahi Camera, Nippon Camera. Ses photographies font partie de plusieurs collections privées et publiques, notamment la Bibliothèque Nationale de France, l’Okinawa Prefectural Museum & Art Museum.
Eri Makita réalise elle même ses tirages, toujours en format carré, avec beaucoup de soin. Les photographies présentées dans cette exposition ont été prise entre 2002 et 2012 au Japon, en Corée, et en France.
Eri Makita explore les qualités cosmologiques de la photographie, ses clichés sont des fragments de nature à part entière, soumis aux mêmes lois que les constellations ou le corps humain. Elle photographie des végétaux, des pelages, des chairs, des lumières ou des ombres extrêmes, pour signifier en premier lieu que la photographie est un état de l’univers, au même titre qu’un échantillon minéral prélevé sur Mars ou bien une image captée par une sonde dans le cosmos.
Le flottement ou l’étourdissement obscur qui se manifestent dans ses clichés ne sont pas des inventions artistiques, ils désignent l’action vertigineuse dans l’image photographique, des constantes universelles, électromagnétiques, physico- chimiques, gravitationnelles, et leur enregistrement. Un fragment de chair dit que l’image est elle même chair, un plan rapproché de végétaux montre que dans un tirage, l’action des photons ou des particules est à l’oeuvre comme dans les plantes ou dans le corps humain.
Lorsque Eri Makita dit: “J’essaie le plus possible de m’éloigner des mots, et j’attends toujours jusqu’à ce que je voie l’image à saisir. Ma photographie n’explique, ni ne raconte d’histoire. J’essaie de saisir quelque chose qui n’a pas de nom, en flottement entre des mots ou un langage » elle désigne précisément cette naturalité première du tirage, pré-humaine, son appartenance à l’ordre des phénomènes naturels et universels.
Mais ses clichés décrivent aussi la saisie par le cerveau et par une singularité individuelle. Lorsque Makita montre des femmes dans une disposition méditative et radieuse, des vitres ou des fragments de nature convoquant des expériences tactiles ou sensorielles, elle dit l’immersion d’une femme et de ses schèmes mentaux, sa solitude probablement, dans une scène infinie et infinitésimale et la réalité médiane qui s’établit entre la prise individuelle et l’immensité, la collision entre le proche et le lointain, les accidents qu’ils produisent, mais aussi les surprenantes solutions de continuité qu’ils révèlent.
La beauté chez Makita, n’est pas un souvenir de ce que les hommes chérissent, mais une prémonition de ce qui les projettera hors d’eux, dans l’univers.