Première lauréate du prestigieux prix de la fondation W. Eugene-Smith (1980), Jane Evelyn Atwood a été révélée au tournant des années 1970 par un reportage approfondi sur la vie des prostituées en France. En deux décennies, à travers ses recherches et reportages consacrés aux légionnaires, aux “vieillesses”, aux jeunes aveugles ou aux mutilés des mines anti-personnel, Atwood a imposé l’acuité de son regard et la spécificité de son mode opératoire. Parmi les toutes premières, elle a opté pour ce qu’il est convenu d’appeler un travail au long cours, ne pénétrant les univers qui la requièrent qu’après s’être longuement documentée sur eux, telle une cinéaste qui multiplierait les repérages.
Par ce patient processus d’imprégnation, elle établit une confiance et une proximité avec les êtres qu’elle photographie, qui permettent une exploration en profondeur des sujets traités.
Dans chaque reportage de Jane Evelyn Atwood, des histoires particulières, singulières et imprévues surgissent : elles résultent de son extraordinaire capacité à installer une forme d’intimité qui libère la parole et le geste.
Jean-Louis – Vivre et mourir du sida (prix World Press Photo, 1987) est emblématique de la démarche d’Atwood : voulant comprendre par elle même la réalité de cette maladie nouvelle et, plus encore, donner un visage aux malades, elle a accompagné et photographié jusqu’à sa mort Jean-Louis, première victime de la pandémie en Europe ayant accepté d’être médiatisée