Evgenia Arbugaeva est née en Sibérie en 1985, dans la petite ville deTiksi, au bord de la mer Laptev, où elle a vécu jusqu’à l’âge de 8 ans.
Après avoir obtenu son diplôme en gestion d’art à l’Université Internationale de Moscou, elle s’installe à New York. Elle y suit les cours de photographie documentaire au International Center of Photography (2009).
En 2010, elle décide de travailler sur des projets personnels en Sibérie.
Dans sa série la plus célèbre, elle suit une jeune fille nommée Tanya, qui vit à Tiksi et dont les intérêts et le sens de l’aventure ressemblent à ceux d’Evgenia à cet âge. Pour réaliser ces photographies, Evgenia Arbugaeva s’est inspirée de caricatures de l’époque soviétique, qu’elle a trouvé dans des livres pour enfants dans la bibliothèque de Tanya.
«Ces livres sont beaux et ont une signification profonde. lls sont habilement mis en pages, les caractères sont clairs et lumineux. Leurs images transmettent un sentiment d’émerveillement et d’idéalisme naïf qui m’ont toujours captivée.»
Cette série lui a valu le prix du Magnum Emergency Fund en 2012. Elle a reçu prix Leica Oskar Barnack en 2013 et le ICP Infinity Award 2015.
En 2012, elle obtient sa première commande du National Geographic pour photographier des chercheurs de défenses de mammouths sur les îles de Novossibirsk dans l’océan Arctique.
En 2013, passagère d’un brise glace, elle rencontre Slava Korotkiy, météorologiste, unique résident de Hodovarikha, une station météo située sur une petite péninsule dans la mer de Barents. La ville la plus proche est à une heure d’hélicoptère, seul moyen de transport. Evgenia Arbugaeva est tout de suite fascinée par Slava Korotkiy qui vit seul depuis treize ans.
Il fait partie de cette génération de Polyarniki, les explorateurs du nord. À une certaine époque, en URSS, travailler en Arctique était comme voler vers la lune et ces explorateurs étaient des héros au même titre que les astronautes. Ces explorations dans l’Arctique étaient un des thèmes populaires des films et des livres qui ont accompagnés l’enfance d’Evgenia. Elle même a grandi dans l’Arctique et a des souvenirs très précis des stations scientifiques qui entouraient sa ville natale.
« Le monde des villes lui est étranger, il a du mal à l’accepter » dit Evgenia. «Je suis arrivée à Hodovarikha avec l’idée d’un ermite solitaire qui s’est isolé du monde à cause d’un drame profond, mais ce n’est pas la réalité. En fait, Slava n’est pas seul. Il peut disparaître dans la toundra, se fondre dans une tempête de neige. Il n’a pas l’instinct de survie que la plupart des gens ont. C’est comme si il était lui- même le vent, ou le temps.»
Comme l’écrit Giuliano Saldicco : Dans ces photographies d’Evgenia Arbugaeva, il n’y a ni tristesse, ni lassitude, juste un homme qui a trouvé sa place, loin des autres et de la vie. Son regard est incroyable, une lumière spéciale brille au fond de ses pupilles, le genre de lumière qui voudrait dire “j’ai compris quelque chose que vous ne saisirez jamais”.